La loi de santé promulguée en 2016, suivie du projet de refondation des urgences de 2019 engage notre système de santé vers une modernisation qui s’articule autour de la prévention, de la réorganisation des soins de proximité à partir du médecin généraliste et du développement des droits des patients.
Ce mercredi 10 Mai dernier, François Braun, ministre de la santé, annonçait la prochaine adoption de la loi Rist qui permettra entre autres, aux kinésithérapeutes, infirmiers et orthophonistes une prise en charge en première intention de certains patients.
L’Accès Direct : La France accuse du retard
Cela fait bien longtemps que dans de nombreux pays voisins ou outre-atlantique, les physiothérapistes (i.e kinésithérapeutes au Canada) accueillent leurs patients dans leurs cabinets sans qu’ils soient passés ultérieurement par la case médecin généraliste.
En France, c’est un combat de longue haleine mené à l’unisson par les représentants de la profession des kinés (syndicats et Conseil de l’ordre des MK) alors que les médecins freinent quant à eux des quatre fers. Pourtant, toutes les expérimentations montrent la pertinence indéniable de l’accès direct sur le système de santé.
Dans notre podcast , “Maddie, Conversation avec un kiné” enregistré en avril dernier, François Randazzo, Président du syndicat Alizé précise que “dans les pays où cela a été mis en place, on n’observe pas de sursinistralité”.
Effet économique positif espéré immédiat sur le système de santé
Quand on parle des bénéfices de l’accès direct aux soins, on pense d’abord à la libération du temps médical. Par exemple, un patient souffrant de lombalgie pourrait prendre rendez-vous directement chez son kinésithérapeute sans avoir consulté au préalable son généraliste qui lui aurait délivré une ordonnance pour des séances de kinésithérapie.
Ceci présente en effet l’intérêt immédiat de libérer des créneaux de consultations aux médecins.
Cependant le bénéfice principal n’est pas là car tout porte à croire que l’accès direct présente avant tout l’avantage d’une prise en charge précoce du patient qui tend à éviter la chronicisation de sa pathologie. En somme, le patient est vu plus vite, son temps de remise sur pied est réduit, sa reprise de travail plus rapide, le nombre de consultations pour aller vers la guérison est réduit et les arrêts de travail aussi. Tout le monde est content, en particulier le porte-monnaie de la Caisse nationale d’assurance maladie.
Seuls 4% des kinésithérapeutes en France exercent en Maison de Santé
Cette avancée perçue comme un grand pas dans la réorganisation des soins de ville et l’optimisation des parcours de soins aurait pu être majeure, mais le projet initial a tout de même significativement perdu de sa superbe.
Alors qu’initialement, le texte de l’Assemblée nationale inscrivait l’accès direct dans l’exercice coordonné au sein d’une CPTS (Communauté Professionnelle territoriale de Santé) c’est à dire tous les professionnels de santé concernés (kiné, ortho, Infirmier en pratique avancée..), après au Sénat, l’Accès Direct aux Soins ne concernera finalement que les professionnels exerçant en MSP (Maisons de Santé Pluridisciplinaires). Or, seuls 4% des kinésithérapeutes en France exercent en Maison de Santé.
D’un projet qui se voulait progressiste, on aboutit finalement à une application très restreinte du projet initial qui présage un impact assez marginal sur le système de santé.
Faut-il s’en réjouir ?
✍️ Lire notre article : Revalorisation des salaires des kinés 2023